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Un peu de... Tranches de vie - Les petites vacances


J’ouvre un oeil. Un bruit m’a réveillée. C’est quoi? Une voix d’enfant. Ah, les filles sont déjà debout. Ce qui veut dire qu’il peut être n’importe quelle heure entre 6h du matin et 9h30, heures respectives de nos levers.

J’ouvre le deuxième oeil. Ouch.

Il est loin le mur. Et pas de la bonne couleur. Et elle est où, la porte de ma salle de douche?

Mais: je suis où?

Ca fait longtemps que je ne me suis pas posée cette question à ce moment précis de la journée. Depuis l’unif’, à peu près, si ce n’est quelques exceptions en vacances, ou - pire!- de retour de vacances.

Ce n’est la voix d’aucune de mes deux filles. Ce n’est pas ma chambre. Je suis seule.

Je suis chez Tina.

C’est elle qui m’a prêté l’appartement qu’elle a gardé en ville, maintenant qu’elle vit à l’étranger.

Mes battements de coeur qui commençaient à s’emballer se calment.

Oui, ouf, chez Tina.

J’y suis bien. J’y ai passe six de mes neufs journées de congé. Enfin, congé, on s’entend: le visio-colloque à Paris de deux jours et quelques séances à mon lieu de travail privé. Mais light. Très light. Qu’est-ce que j’ai lu! Qu’est-ce que j’ai dormi! Combien d’heures installée sur le fauteuil moelleux du salon, avec télé, ou musique, ou rien, le silence et les petits bruits des cours et des jardins des immeubles autour.

Je ne veux pas savoir quelle heure il est. Moi, toujours à courir, toujours à vérifier combien de temps il me reste avant de, est-ce qu’il y a moyen de resquiller une sieste ne fut-ce que d’une demi-heure… Toujours à contrôler que personne n’a essayé de me joindre, ou m’a enfin répondu ou rappelée, à guetter une bonne ou mauvaise nouvelles sur ce fichu smartphone.

Je n’ai absolument rien à faire, aucune obligation, c’est le dernier jour entier ici.

Je me lève, j’allume le chauffage, je me fait une tasse de thé bouillant à déguster sur la terrasse avec ma première clope, plaisir coupable du début de journée.

Et je lis, je lis.

Je rentre, je m’allonge sur la canapé.

Je finis un livre, je commence le suivant.

Je me fais un café, je grignote un biscuit.

Ai-je faim? Non, pas encore.

Une bonne douche pour émerger définitivement? Pas encore.

Je lis, encore.

Je déguste le plaisir intense d’ignorer depuis combien de temps et combien j’en ai encore devant moi.

Ca s’étire, je m’étire.

Je lis…

Le vrai luxe.

Quand je craque et j’ouvre le clapet du gsm il est déjà 11h30 et je n’ai aucune idée de l’heure à laquelle j’ai quitté le lit.

Là, j’ai faim. Là, j’irai bien lire mes mails, zieuter les réseaux.

Ben, non, je peux m’en passer.

Je vais encore lire.

Tout à coup j’ai envie de frites. Mais je n’ai pas envie de sortir, je suis bien, au chaud. Je me prépare quand même, il faut manger tout de même. L’envie de frites se fait insupportable, l’idée d’aller en chercher aussi.

Je regarde hésitante sur le net, je trouve un endroit pas loin. Oui, mais, si j’y vais à pieds, le temps de rentrer elles seront froides.

Un coursier à vélo, par contre…

Je me cherches des excuses. Je craque, tant pis: je vais me faire livrer.

Quand le type sonne en bas, je m’en veux de le faire monter, chercher la porte: j’enfile vite baskets et masque et je descends, ce sera mon plus gros effort physique de la journée.

Je dévore le repas. Je me dis que je vais faire une sieste.

Je reprends mon bouquin, finalement je ne m’endors pas.

On est le soir, dans ce moment un peu angoissant où le soleil se couche déjà, en hiver.

Il va faire noir et normalement, en semaine, il reste encore un tas de choses à faire, dont parfois terminer au boulot avant de pouvoir repartir chez soi.

Ou alors, le week-end, je me dis: mince la journée est finie, mais je dois encore attendre des heures avant de pouvoir aller dormir, qu’est-ce que je vais faire? Il y a plein de petites tâches automatiques ou désagréables à effectuer, mais je n’ai pas envie de m’en occuper; du coup, je ne m’autorise pas non plus à faire quelque chose d’agréable, ou à ne rien faire du tout.

Là, dans cet appartement, ça va. Je ne suis pas angoissée, ni fatiguée, ni oppressée.

Pelotonnée, j’observe les couleurs qui changent par la grande porte-fenêtre. Les tintements et conversations du soir qui commencent chez les voisins, à travers les murs.

Qu’est-ce que je vais lire après?

Ce soir, je regarderai une émission avec des danses, que j’adore, qui dure jusque tard dans la nuit.

Puis j’irai plonger dans un sommeil réparateur.

Demain, je rangerai un peu, j’arroserai les plantes, je referai ma valise, je rentrerai trouver mes filles et la famille, avec un petit gâteau en prime pour fêter un peu leurs anniversaires, à mes petites.

Lundi la course reprend, il sera bien assez tôt.

Pour l’instant, je profite.

Je passe un moment sur internet, je trouve les références d’un livre que je voudrais là tout de suite: je garde, idée cadeau pour bientôt.

Un dernier coup de téléphone à Tina, qui est dans un autre pays, avant de quitter ce lieu.

« Qu’est-ce que je suis bien chez toi, c’est magique! »

« Oui, je comprends. Nous aussi on s’y sent bien, il y a une bonne énergie… »

« Je voulais te remercier. Tu m’a fait un beau cadeau en me permettant de loger ici. Tu n’imagines pas. En fait je suis un peu émue… »

Ma voix se fissure un peu, je me sens un peu bête.

Juste après avoir raccroché, je lui enverrai une photo d’une de ses plantes, qui a poussé: plein de jolies fleurs d’un mauve vif ont éclos.

« C’est bien d’être émue. Moi aussi, je le suis. »

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