top of page

POST RÉCENTS : 

ME SUIVRE : 

  • Facebook Clean Grey
  • Twitter - Grey Circle

Un peu de... lecture pendant le mois sans HORECA (et avec couvre-feu, etc.) - Les transports par tem

  • Chicca Cocca
  • 4 nov. 2020
  • 4 min de lecture

Texte écrit au tout début du confinement de Mars 2020. Evidemment j'ai repris les transports depuis. Evidemment ce n'est plus totalement pareil. Mais un peu.

Il y a quelques jours, j'ai repris le bus.

J'ai compté dans ma tête combien de temps ça faisait depuis la dernière fois. Pile poil depuis le renforcement du confinement, le mercredi 18 mars. Après ça, quand j'ai été obligée de me déplacer pour mon travail, Jules m'a conduit en voiture, est venu me chercher ou j'ai été à pieds.

A pieds, ça fait bouger un peu, il y a le soleil, on sait garder les distances plus facilement et on peut sourire, de loin, à ceux qu'on croise.

Dans un espace confiné, c'est juste stressant: on doit se tenir sans toucher des trucs, on ne sait pas s'éloigner vite si quelqu'un approche de trop, tout le monde respire dans son petit coin et on se regarde méfiants, si on entend le moindre toussotement ou reniflement.

J'ai essayé de rentrer à pieds, mais j'étais fatiguée, n'ayant pas bien dormi du tout, j'avais la migraine et mes règles, j'avais mal partout et j'avais envie d'être chez moi pour pleurer tranquille, parce qu'après une journée de permanence téléphonique au centre, les émotions à métaboliser, les siennes et celles des patients, sont débordantes. Plus tout le reste qui est compliqué.

Alors à mi-chemin, j'ai vu cet arrêt de bus désert, au soleil et je me suis dit: allez, pourquoi pas, pour une fois, j'en peux plus.

Une autre dame est arrivée, s'est mise bien loin de moi. J'ai arrêté de faire les cent pas, parce que j'ai vu que ça la stressait que je ne reste pas tranquille. J'ai fumé, j'ai vérifié que j'avais bien mon attestation de travailleuse dans ma poche. J'ai mis mes gants, soulevé mon tourne-cou. Je l'ai baissé et fumé une clope, en attendant.

Premier bus: c'est noté "Full" devant.

Fuck.

Deuxième bus, heureusement juste derrière. J'ai regardé par la vitre avant de monter: ouf, il était presque vide. Il n'allait pas me déposer à l'arrêt le plus proche de chez moi, mais presque; tant mieux, je me suis dit, je marcherai encore un peu avec la musique dans les oreilles et peut-être encore une clope.

Je suis montée, en ayant envie de me coller un panneau sur le dos qui aurait dit: "Si je tousse, c'est parce que je fume beaucoup trop, deux fois plus que d'habitude: désolée, je gère mon stress comme je peux, si j'enlevais les cigarettes, ce serait intenable. Je vais diminuer, après, promis. Bisous. Enfin, non, pas de bisous, pardon."

Les gens avaient presque tous un masque, ils étaient tous éloignés les uns des autres, la tête baissée. Je me suis assise à une place de quatre, seule, vers le fond. J'ai eu envie de fermer les yeux, mais il faut tenir les autres à l'oeil. Je me suis dit qu'il était peut-être possible de bloquer ma respiration jusqu'à destination: j'étais pas la plus nulle quand je jouais à ça, petite, avec mes cousins.

Bouffée de nostalgie.

Reprise des esprits: fais pas ça ma vieille, tu vas pas tenir, tu vas avoir une quinte de toux et on va te faire valser hors du bus.

J'ai eu envie d'appuyer la tête contre la vitre, dans un rayon de soleil bien chaud, mais non, on ne peut pas non plus. J'ai eu envie de pleurer, mais ça allait couler de partout, j'allais devoir me moucher: même conclusion que pour le concours d'apnée. Je me suis assise tout au bord du siège: ma veste étant la seule surface de contact avec le bus. J'ai visualisé mon trajet pour descendre en gardant 1,50 entre moi et les autres.

Le pire: ce message automatique diffusé en boucle:

"Gardez les distances de sécurité. Ne vous asseyez pas les uns près des autres. Ne vous déplacez dans le bus qu'en cas de nécessité. Gardez les distances de sécurité..." Descendre est un cas de nécessité? Dans l'absolu?

Tu parles d'un épisode de "Black Mirror". Je me suis dit: "La vache, c'est la vraie vie, pas une saleté de cauchemar."

S'il y en avait eu un qui s'était retourné pour essayer de me mordre, je n'aurais pas été plus étonnée que ça.

Ca n'a pas duré longtemps, 4-5 arrêts. Je me suis demandée si ça valait la peine, si je n'aurais pad dû forcer et marcher, marcher, marcher. Enfin, mon arrêt. Avec un mouchoir, j'ai appuyé sur le bouton. J'ai failli ne pas y penser.

Merde, quelqu'un veut monter!

Il était censé attendre que les gens descendent, mais voilà, il ne le faisait pas vraiment, il se tenait dans l'encadrement, sur le côté, pas assez loin.

Moi, qui quand je vais au boulot en temps normal, je fais facilement des remarques plus ou moins drôles et/ou désagréables en fonction de mon humeur, à ceux qui ne me laissent pas passer, je n'ai rien dit.

J'étais trop épuisée.

Je suis vite passée, j'avais juste envie d'être dehors, de respirer à fond, de sentir mes jambes en mouvement, puis d'arriver chez moi et de prendre une longue longue douche chaude, après avoir laissé tous les trucs de l'extérieur dans notre sas, à l'entrée.

Putain, plus jamais. Enfin, on se comprend.

Comments


RSS Feed

© 2017 par Chicca Cocca

. Créé avec Wix.com

    • Grey Facebook Icon
    • Twitter - Grey Circle
    bottom of page