Un peu de... lecture pour le mois sans HORECA (et avec couvre-feu) - C'était possible il y a un
- Chicca Cocca
- 27 oct. 2020
- 4 min de lecture

Texte écrit la nuit entre le 17 et le 18 Octobre 2019.
Il y a des journées qui commencent tôt et qui se terminent tard et entre les deux, il y a de quoi remplir une semaine... ou plusieurs.
Réveil à 5h45, parce que à 7h45 je dois être au point de rendez-vous avec un collègue afin de faire du co-voiturage jusqu'à une autre ville.
Là-bas, c'est la journée d'études "Accueillir!" qui a eu lieu. J'ai passé quelques heures agréables à écouter des exposés très intéressants, certains présentés par des collègues impliqués et pertinents de mon réseau professionnel, d'autres par des cliniciens que je ne connaissais pas du tout. Il y a eu aussi le débat avec le réalisateur du film "Burning Out" et une des travailleuse de la santé de son documentaire: passionnant.
Comme à chaque fois que je passe du temps avec les collègues du centre où je travaille depuis 14 ans, les moments de rires et de fou-rires n'ont pas manqué.
Symboliquement, l'institution qui a organisé cet événement est le premier lieu où j'ai travaillé avec un vrai contrat de salariée, il y a 15 ans. J'ai revu deux anciennes collègues et quel plaisir de prendre de leurs nouvelles et raconter un peu des miennes! Puis, de voir à quel point l'équipe et les orientations de travail ont changé depuis mon départ. Il est loin ce temps où toute jeune, naïve, motivée et inexpérimentée je faisais mes premiers pas dans le monde passionnant de mon métier, en entrant par une porte qui n'est pas des plus simples: j'étais psy en milieu carcéral, pour des personnes dépendantes, pendant un an.
Dans la journée, j'ai papoté et discuté avec plusieurs personnes, donc, venues de plusieurs époques et lieux de mon parcours, et cet espace-temps était bizarre et agréable.
Un petit dernier verre au drink de clôture avant de courir à la gare pour avoir un train vers Bruxelles. J'ai raté celui que je visais: rien à faire, après autant de temps, je ne reconnaissais pas la ville, je ne retrouvais pas mes repères: je suis partie dans la mauvaise direction - et le contrôleur ne m'a pas même attendue.
Train suivant, je suis un peu trempée par la pluie, mais j'ai une place assise. Musique dans les oreilles, je m'endors à moitié, mais je ne rate pas mon arrêt, ouf.
Je marche vite vers la librairie où ma journaliste-autrice-chroniqueuse belge préférée va parler de son deuxième roman "Les yeux rouges". Je passe deux coups de fil en marchant et en fumant une énième cigarette.
Je n'arrive pas trop en retard, malgré tout. Je suis heureuse d'être là, même si j'ai déjà mon exemplaire signé depuis quelques semaines. Je n'avais pas encore pu l'entendre parler de ce livre. Nous sommes le lendemain du jour où le harceleur contre qui elle a porté plainte il y a des années, a été renvoyé en cour correctionnelle et c'est une victoire, pour elle et pour beaucoup d'autres femmes et d'autres personnes cyber-harcelées.
Elle est, comme à son habitude, fine, drôle, pertinente. J'avoue, je ne suis pas peu fière qu'à la fin, quand je profite du moment des dédicaces pour aller lui dire bonjour, elle me reconnaisse et me fasse la bise. J'ai un vrai plaisir à échanger quelques minutes avec elle, à faire quelques blagues, à en rire.
Et là aussi, dans cette librairie, en plus de reconnaître pas mal de têtes de ma radio préférée, je recroise une connaissance plus vue dans la vraie vie depuis des années, nous parlons aussi un bon bout de temps: le féminisme, le harcèlement, tout ça... il y a aussi un contact jusque là virtuel qui s'est mise à m'apprécier et à lire mes petits textes, depuis quelques mois.
Autre transition et me voilà au restaurant au centre ville: je rejoins une autre collègue qui participe à une semaine d'accueil du réseau professionnel toxicomanie de Tunisie. Je suis gâtée: ma présence n'était pas prévue, mais tout le monde m'accueille, me propose de partager le repas: je crève de faim, c'est délicieux.
Nouveaux contacts, chouettes personnes, d'ici ou de là-bas: je n'aurais pas cru ce matin en me levant que quelques heures après je discuterais des suivis des personnes dépendantes avec une psychanalyste jungienne qui travaille en Tunisie, dans un tout nouveau centre ouvert là-bas.
Puis, balade dans cette si jolie Bruxelles nocturne, quelques au revoir, et nous voilà, les rescapés, à la soirée d'ouverture du Festival des Libertés. Quelques verres, discussions intenses avec l'un ou l'autre et là je vois et je dis bonjour à une vingtaine de personnes que je connais, venues de plein de dimensions différentes de ma vie: gens du passé, du milieu professionnel, des voisins, des amis, des amis d'amis, des ex d'amis. Tout se mélange et avec deux verres de vin, ça commence à tourbillonner pas mal dans ma tête, c'est fort émotionnellement.
Mais le concert et la compagnie sont bons, alors, c'est une excellente soirée. Oui, décidément.
Nous sommes en semaine, demain, on travaille, même si c'est le dernier jour avant le week-end. Il me reste un zeste de raison, je rentre "tôt", ma collègue me ramène.
Si je devais identifier tous les "amis Facebook" avec qui j'ai échangé au moins un bonjour aujourd'hui, je serais à plusieurs dizaines de "tags".
Il y a des jours un peu incroyables, quand on regarde de près.
Je suis épuisée, mais... difficile de trouver le mot "juste": Nourrie? De tous ces liens, toutes ces intersections, tous ces échanges? Oui, nourrie, c'est pas mal. La vie est sympa, quand même, des fois. Et intense. Aujourd'hui en tout cas.
Je vais m'écrouler dans mon lit. Je vais bien, très bien dormir.
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