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Un peu de... livres: "La petite femelle" (Philippe Jaenada): Un grand livre à propos d&#39


Ce bouquin, Jules l'avait offert à sa maman pour je ne sais plus quelle occasion, il y a quelques temps. Comme elle le fait à chaque fois, elle me l'a prêté après l'avoir terminé. Et bien, j'ai lu la quatrième de couverture une dizaine de fois, il ne me donnait pas envie. Il replongeait tout en bas de ma pile. Et je me disais que je ne le lirais sans doute pas du tout.

L'été passé, mon ami Laurent l'a commencé pendant nos vacances communes. Il en avait déjà lu un de cet auteur, il trouvait son style particulier, mais aimait bien. Puisque depuis que nous nous connaissons nous nous sommes prêtés des dizaines de livres, ma curiosité a été réveillée: de retour à la maison, je l'ai repris en main... j'ai relu la quatrième... mais non.

Et puis, devinez quoi, une femme dont l'oeuvre m'inspire beaucoup (oui, elle, Myriam Leroy!) en a parlé dans une chronique à la radio. Elle en a pas beaucoup dit, prise par le temps, juste merci à l'auteur, d'avoir écrit ce livre.

Ah. Bon. Puisque je commence à savoir ce qui me touche de ce qui la touche, j'ai remonté "La petite femelle" à la deuxième place des lectures à venir.

Là, j'ai dépassé la moitié. Ce livre est extraordinaire, je n'en ai jamais lu des pareils. Ce n'est pas un roman, pas vraiment, mais il est captivant. L'auteur y cause à la première personne et nous propose sa version de l'histoire de Pauline Dubuisson, une jeune femme qui a tué son "ex" au début des années '50, qui a été démolie, écrasée, humiliée par le monde "de la justice" et par les médias (la presse, fondamentalement, à cette époque), avant d'être condamnée.

Il reprend tout depuis le début (il commence quelques générations avant sa naissance) et nous embarque. Il donne des clés pour la comprendre, Pauline. Il met à jour des preuves évidentes de tout ce qui, dans l'enquête, dans le procès, et dans ce qui a été écrit par la suite (je ne connaissais pas ce "fait divers", mais visiblement il a passionné les foules et les esprits jusqu'à aujourd'hui) a été modifié, supprimé, interprété, inventé de manière éhontée pour transformer Pauline en un monstre, la tuer symboliquement avant la "vraie" peine de mort.

C'est ahurissant.

En filigrane, nous y voyons un tableau assez clair de la condition des femmes de l'époque, les relents de ces représentations nous enfument jusqu'à aujourd'hui.

Il ne s'agit pas de nier la gravité de l'acte de tuer, mais de montrer que Pauline Dubuisson a été surtout jugée parce qu'elle était une femme hors du cadre, qui s'est rêvée égale de l'homme. Ce n'est pas son acte qui a été condamné, mais son désir de se donner un destin décidé par elle seule, ses velléités de femme libre.

Pas de circonstances atténuantes pour elle, au contraire, si elle avait volé un bonbon en troisième maternelle, c'était la preuve déjà de son égoïsme et de sa sombre personnalité. J'invente, mais on n'est pas loin.

Elle a essayé, Pauline, comme elle pouvait, à sa manière fragile, maladroite, paradoxale et complexe. Elle a échoué et tout s'est terminé par son acte irréparable qui a gâché (et mis un terme à) plusieurs vies.

C'est émouvant, d'autant que le style de l'écrivain rend l'histoire vibrante et palpitante, comme si elle avait lieu sous nos yeux.

Philippe Jaenada ne s'encombre pas de tabous, il écrit ce qu'il pense, l'humour (noir et de toutes les autres couleurs) est omniprésent, il digresse, ouvre et ferme des doubles parenthèses, nous raconte des trucs qui lui arrivent pendant qu'il écrit qui n'ont rien à voir avec Pauline Dubuisson, prend des exemples de sa vie pour illustrer ses propos...

Mais ce qu'il avance se base sur des recherches minutieuses et poussées, ses analyses sont pertinentes et quand il n'est pas au plus près des faits, il nous prévient.

Un équilibre parfait entre l'art de raconter une personne, une histoire, tout en se racontant soi. Et en abordant des sujets universels.

Je trouve ça génial, je veux dire, de l'ordre du génie. J'avoue, j'aimerais que mon écriture ressemble fort fort à la sienne, un jour.

D'habitude, si je n'ai pas fini, je ne conseille pas, mais là, à 250 pages de la fin (oui, c'est gros, mais on ne le sent pas), je n'ai pas de doutes: allez-y. Pauline Dubuisson et Philippe Jaenada valent le(s) détour(s).

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