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Un peu de... séries: "Twin Peaks" (David Lynch)


Cette nuit, aux USA, a eu lieu un événement historique. Enfin, bon, pas historique au sens large, quoique, peut-être, dans l'histoire des séries, de l'art, de la culture. J'entends historique plutôt par rapport à mon histoire à moi.

Comment expliquer mon attachement profond, viscéral, à la série "Twin Peaks" (qui n'est comparable dans mon esprit, qu'à celui que j'ai pour "Six Feet Under", mais différent, tout de même)?

Lorsque "Twin Peaks" a débarqué au début des années nonante, tel un ovni, dans le paysage télévisuel italien (et mondial, mais bon, moi j'étais en Italie), le fait qu'un grand réalisateur, David Lynch en l'occurrence, crée une série pour la télévision, était loin d'être monnaie courante, comme aujourd'hui. Mais cet aspect des choses m'échappait complètement, d'ailleurs je ne connaissais ni Lynch, ni ses films, à l'époque.

Alors, va savoir pourquoi, dès les premières images de "pubblicità" censées promouvoir cette série-événement, moi qui "sortais" à peine des dessins animés et des jeux vidéos Nintendo, j'ai été complètement captivée. Notamment par le visage du cadavre de Laura Palmer, entouré d'une bâche en plastique, livide, mouillé, parsemé de sable et de cailloux. Magnifique. Quoi? Mais c'est morbide! Ben oui, un peu, très, peut-être, et pourtant, si vous avez l'image en tête avec la musique en arrière-plan, vous savez très probablement de quoi je parle.

Clac! Ca me fait ça, à l'intérieur, mais bon, j'ai treize ans, ces derniers temps ça arrive tout le temps, sans crier gare, je ne comprends pas tout ce qu'il se passe, je fais connaissance avec moi-même ces temps-ci et je n'y parviens que de manière assez confuse.

Le but ultime de mes journées devient l'obtention de la permission de regarder cette série, coûte que coûte. Alors, comme la sage petite fille que je suis censée être encore, je demande l'autorisation à mes parents, de manière assez vague: un polar, avec un meurtre dans un village, un détective du FBI pour découvrir le coupable. Je ne mens pas vraiment, ça a l'air, plus ou moins, de ça. Mais je sais, je sens que ce n'est pas que ça.

Ca passe: je lis les Agatha Christie depuis mes 8 ans, le "feuilleton" n'a pas l'air bien plus méchant.

Alors je regarde, seule, le jour J, et je plonge. Je plonge dans ce qui est un monde, un univers entier et en même temps je plonge à l'intérieur de moi-même. Polar, oui, mais aussi soap-opera, intrigues amoureuses, science fiction, horreur, surréalisme, mystères: mais de quoi ça parle, nom d'une pipe, ce truc? Plongée donc, plongée dans la peur, dans le sombre, mais aussi dans la poésie, dans l'émotion, dans les affres et les délices de se laisser aller à ne pas tout comprendre. Comme en moi-même. Je deviens "addict" et il ne faut surtout pas que mes parents se rendent compte de ce que c'est vraiment Twin Peaks, du moins, je le crois: s'ils regardent un épisode, c'est terminé. Cela devient mon premier gros secret d'ado officiel. De ceux qui après coup semblent sans importance, banals, et peut-être qu'ils n'ont même pas raison d'être, mais ça y est, le jardin secret vient de germer, la coupure avec l'enfance est avérée (la coupure n'est qu'une illusion, bien sûr, mais c'est comme cela qu'on dit, non?)

J'ai un secret. Ou j'ai un mystère? (En italien, la série se nommait: "I misteri di Twin Peaks")

Être complètement "prise" dans le monde de Twin Peaks, est aussi ce qui m'a permis de traverser ce qui se passait chez moi, à l'époque, qui avait un goût vaguement lynchien, aussi, mais en moins bien. Sans doute. Je me dis après-coup. Va savoir. Et de traverser mille autre choses qu'il faut bien traverser à 13 ans.

Puis un jour, ma maman a eu des soupçons, ou je ne sais quoi: elle a voulu regarder avec moi l'épisode enregistré la veille (entretemps, la deuxième saison a été repoussée tard dans la soirée, pas le choix). J'ai essayé de tenir bon, de garder la face, de donner le change. Ma relation avec maman n'était pas très simple non plus, à l'époque, mais ça c'est une autre histoire (enfin, non, mais bon, voilà.) L'épisode s'ouvrait sur la découverte d'un meurtre de Windom Earl, le cadavre enfermé dans une grotesque pièce d'échec géante. Ils allaient bientôt rentrer dans la Black Lodge, et là, ça n'allait pas le faire. Ca suintait le bizarre, le "pas bien pour ton âge", le "mais qu'est-ce que tu regardes?". J'ai stoppé la cassette. J'avais tenu dix minutes. J'ai dit: "Ca va, c'est bon, je vais plus regarder". Et je suis partie de la pièce. Mon degré de capacité de transgression, à l'époque, ne m'a permis que de continuer à enregistrer les épisodes pour "plus tard, qui sait?" On était à quatre épisodes de la fin.

Je ne sais pas pourquoi, mais même si j'ai eu des milliers d'occasions de regarder ces cassettes dans les années suivantes, je ne l'ai pas fait. J'ai coupé en même temps que j'ai appuyé sur le bouton "stop". Fini, terminé, de toute façon aucun de mes amis ne regardait ce truc "troppo strano". Plus entendu parler de Twin Peaks, pendant un bon bout de temps. Juste qu'à chaque fois que j'écoutais la BO de Badalamenti j'en avais des frissons, sans plus trop savoir pourquoi (et encore aujourd'hui: même effet).

Quatre ans après, j'ai depuis vécu quelques aventures: la preuve, j'habite en Belgique. Pas prévu au programme, à la base. Un jour, je dois avoir 18 ou 19 ans, je retrouve les cassettes dans une caisse (oui, elles m'ont suivi!) et là, bam, je me dis: je vais enfin regarder comment se termine ce truc que j'aimais tant. J'ai regardé les quatre épisodes d'affilé. Vous imaginez ma tête à la fin du dernier épisode. QUOI?! QUOI?! C'est ça, la FIN?!!!!

Ben, non, ce n'était pas la fin, mais je ne le savais pas encore. Laura Palmer avait promis qu'on se reverrait 25 ans plus tard. 26 ans après, nous y sommes. C'était cette nuit, aux USA. "It is happening again". Ce ne sera peut-être pas la fin non plus, parce qu'en fait, ce serait vraiment anti-lynchien d'avoir une fin. Mais il y a une suite. Il y a une troisième saison et les fans sont tous là à attendre je ne sais pas quoi, comme moi.

Je le raconterai, peut-être, ce que je vais y re-trouver? Je dois juste attendre, être patiente, éviter les spoilers jusqu'à ce que j'aie une bonne version de l'oeuvre. Ca va, c'est historique, oui, mais pour ce rendez-vous là, je ne suis pas à quelques mois près.

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